No. 1.—Ordonnance du roi, pour rèler la conduite et fixer les obligations des commercants et gens de mer de ses ètats en temps de guerre entire d’autres puissances maritimes, (le 4 mai 1803.)

Nous, Chrétien Sept, par la grâce de Dieu Roi de Dannemarc & de Norvégue, &c., &c., à tous ceux qu’il appartiendra:

[520] Quoique les règles d’après lesquelles les comer*çants et gens de mer, nos sujets, doivent se conduire en temps de guerre entre d’autres puissances maritimes, soient détérminées par plusieurs de nos ordonnances antérieures, nous avons néanmoins jugé nécessaire, dans les circonstances actuelles, d’exposer dans une seule ordonnance le contenu de ces règlements, modifié à plusieurs égards, et tel qu’il devra dorénavant servir de règie, afin que par la présente la plus grande publieité soit donnée aux principes invariables, d’après lesquels nous entendons maintenir en tout temps les droits des cominerçants et gens de mer de nos états, et que personne ne puisse prétendre cause d’ignorance relativement aux devoirs qu’il aura à remplir comme sujet danois dans un cas semblable. En consequence, c’est notre volonté royale que le règlement suivant soit dorènavant ponctuellement observé comme la seule règle de leur conduite par tous ceux qui voudront prendre part aux avantages que la neutralité de notre pavilion, en temps de guerre, assure au commerce et à la navigation légitime de nos sujets; à ces causes, révoquant par la presente nos ordonnances antérieures relativement à la conduite de nos dits sujets pendant une guerre maritime étrangère, nous ordonnous et publions ce qui suit:

Art. 1. [521] Quiconque des commerçants ou gensde mer de nos états voudra faire partir un vaisseau à lui appartenant, pour quelque port ou place étranger, sur laquelle l’effet d’une *guerre survenue entre d’autres puissances maritimes pourra s’étendre, sera tenu de se procurer un passeport royal en latin, et lesautres papiers et actes requis pour l’expédition légitime d’un navire. À cette fin nos sujets seront avertis, au commencement d’une pareille guerre, pour quels ports ou places étrangers on aura jugé nécessaire que leurs navires soient pourvus de notre passeport royal en latin.

Art. 2. Ce passeport ne pourra être dé1ivré au propriétaire du vaisseau qu’après qu’il aura obtenu le certificat qui constate sa propriété.

Art. 3. Pour obtenir le certificat ordonné par l’article précédent, il faut être notre sujet, né dans nos états, ou avoir aquis, avant le commencement des hostilités entre quelques puissances maritimes de l’Europe, la jouissance complète de tous les droits de sujet domicilié, soit de nos pays, soit de quelqu’autre état neutre. Le propriétaire du navire [Page 118] pour lequel on demande le certificat devra, dans tous les cas, résider dans quelque endroit de nos royaumes ou des pays à nous appartenants.

Art. 4. [522] Il faudra, pour se procurer le certificat ci-dessus énoncé, se présenter pardevant le magistrat de la ville ou place maritime d’où l’on expédie le navire, ou bien du lieu de la résidence de la plupart des propriétaires; *ceux-ci seront tenus de certifier ou tous personnellement, soit par serment de vive-voix, soit par formule de serment écrite et signée de leur propre main, ou du moins le propriétaire principal au nom de tous, que le navire est vraiment à eux, tous ensemble nos sujets, appartenant, & qu’il n’a à son bord aucune contrebande de guerre qui soit pour le compte des puissances belligérantes ou pour celui de leurs sujets.

Art. 5. Durant le cours d’une guerre maritime étrangère personne née sujet d’une des puissances qui s’y trouvent impliquées ne pourra être capitaine d’un bâtiment marchand naviguant sous notre passeport royal, à moins qu’il n’ait justifié d’avoir acquis le droit de burgeoisie dans nos royaumes ou pays, avant le commencement des hostilités.

Art. 6. [523] Tout capitaine marcband qui veut être admis à conduire un navire muni de notre passeport royal doit avoir acquis le droit de bourgeoisie quelque part dans nos états. Sa lettre de bourgeoisie devra être en tout temps à bord de son navire. Avant son départ du port où le passeport lui aura été remis, il sera tenu de prêter serment, suivant la formule prescrite, qu’à son su & de sa volonté il ne sera rien commis ou entrepris relativement au dit navire qui puisse entraîner quelque abus des passeports et certificats qui lui ont été délivrés. *L’acte de serment sera envoyé au département, compétent, avec la requête pour la délivrance des passeports. Mais en cas que cela ne puisse deffectuer par raison s ‘absence du capitaine, le propriétaire du navire sera tenu d’en donner connaissance au dit département, & notre consul ou commissaire de commerce dans le district où le capitaine se trouve pourvoira sous sa responsabilité à ce qu’en recevant le passeport il prête le serment ordonné.

Art. 7. II ne doit se trouver a bord des navires munis du passeport ci-dessus ordonné aucun subrécargue, facteur, commis ni autre officier de navire sujet d’une puissance en guerre.

Art. 8. [524] La moitié de l’équipage des navires ci-dessus spécifiés, y compris lesmaîtres & contre-maîtres, sera composé de gens du pays. S’il arrive que l’equipage d’un navire devienne incomplet en pays étranger par désertion, mort ou maladie, & que le capitaine soit dans l’impossibilité de se conformer à la règle susdite, il lui sera permis d’engager autant de sujets étrangers, & de préférence ceux des pays neutres, qu’il en aura besoin pour continuer son voyage; de manière, cependant, que le nombre des sujets d’une puissance en guerre qui se trouveront à bord du navire n’excède en aucun cas le tiers du nombre entier de l’équipage. Chaque changement *qui y aura lieu, le capitaine sera obligé de le faire insérer, avec explication des causes qui l’ont rendu nécessaire, dans le rôle d’équipage appartenant au navire, lequel rôle sera dûment attesté par le consul ou commissaire de commerce, ou son délégué, dans le premier port ou le navire entrera, pour que cette attestation puisse servir de légitimation au carntaine partout où besoin sera.

Art. 9. Les actes et documents ci-après spécifiés devront toujours être à bord des navires pourvus de notre passeport royal, savoir:

Le certificat ordonné par l’article 2;

La lettre de construction, &, si le navire n’a pas été construit pour compte du proprietaire actuel, il y sera joint le contrat de vente ou lettre [Page 119] d’achat. Le premier de ces deux actes et le second, s’il a eu lieu, accompagneront la requête de Parmateur pour obtenir le passeport;

Le passeport royal en latin, avec les traductions y appartenantes;

La lettre de jaugeage;

Le role d’équipage, dûment vérifié par les officiers à ce compétents;

Les charteparties & les connaissemens concernant la cargaison: & enfin l’attestation du bureau de douane établi sur les lieux ou elle a été prise.

Art. 10. [525] La lettre de jaugeage sera expédiée par des *officiers à ce constitutés dans les places maritimes de nos royaumes et pays. En cas qu’un de nos sujets ait acheté un navire en quelque port étranger, notre consul ou commissaire de commerce sur le lieu sera autorisé à pourvoir au jaugeage & à expédier au capitaine une lettre de jaugeage provisoire, laquelle sera réputée valable jusqu’à ce que le navire arrive à quelque port de nos états, ou il sera jaugé et marqué en due forme, après quoi il sera expédié, dans la forme ordinaire, une lettre de jaugeage, qui par la suite fera partie des papiers de mer appartenant au navire.

Art. 11. Il est défendu à tout armateur d’acquérir, et à tout capitaine d’avoir à son bord, des papiers de mer doubles; il n’y sera point arboré de pavilion étranger pendant que le navire poursuivra son voyage avec les papiers & actes par nous accordés à cet effet.

Art. 12. Notre passeport royal n’est valable que pour un seul voyage—c’est-à-dire, depuis le temps que le navire, après en avoir été pourvu, aura quitté le port d’où il est expédié, jusqu’à son retour au même port; bien entendu que dans l’intervalle il n’aura pas changé de propriétaire; auquel cas l’acquéreur sera tenu de se procurer sous son nom les papiers et documents nécessaires.

*Art. 13. [526] Comme d’après les principes généralement établis, il ne saurait être permis aux sujets d’une puissance neutre de transporter, par le moyen de leurs navires, des marchandises qui seraierit réputés contrebande de guerre, si elles étaient destinées pour les ports d’une puissance belligérante ou qu’elles appartinssent à ses sujets, nous avons jugé convenable de fixer expressement ce qui devra être compris sous la dénomination de contrebande de guerre, afin de prévenir qu’il ne soit abusé de notre pavilion pour couvrir le transport des articles défendus, & pour que personne ne puisse alléguer cause d’ignorance à ce sujet. Nous déclarons, en conséquence, que les articles & marchandises ci-apiès énoncés seront réputés être contrebande de guerre, vis: canons, mortiers, armes de toute espèce, pistolets, bombes, grenades, boulets, balles, fusils, pierres à feu, mèches, poudre, salpêtre, soufre, cuirasses, piques, épées, ceinturous, gibernes, selles et brides, en exceptant toutefois la quantité qui peut être necessaire pour la défense du vaisseau et de ceux qui en composent l’équipage.

En outre, resteront en pleine vigueur les engagements positifs contractés avec les puissances étrangères, relativement aux marchandises & propriétés dont ces engagements prohibent le transport en temps de guerre; & sera pour cet effet dressé un règlement particular, pour être déiivré à chaque armateur quand il recevra notre passeport royal.

*Art. 14. [527]
[528]
En cas qu’un vaisseau destiné pour quelque port neutre prenne sa cargaisou des marchandises qui seraient contrebande de guerre si elles étaient destinées pour un port appartenant à quelque puissance belligérante, il ne suffira pas que le propriétaire et le capitaine ayant prêté le serment ordonné ci-dessus, mais l’affréteur & le capitaine seront de plus obligés de donner conjointement une déclaration différente de la déclaration générale de douane, dans laquelle seront spécifiés le genre, la quantité et le prix de ces marchandises. Cette déclaration sera vérifiée [Page 120] par les officiers de douane à l’endroit d’où le navire est expédié, après quoi l’officier de douane à ce compétent la fera incessamment parvenir à notre chambre générate des douanes, pour servir à contrôler & à constater l’arrivée des marcbandises y spécifiées, au lieu de leur destination y énoncé, à moins que l’arrivée n’en ait été empêchée par capture ou détention violente, ou par quelque autre accident, de quoi il sera fourni preuve suffisante. Le contrôle s’effectuera de la manière qui suit: Le fréteur de ces marcbandises devra fournir une attestation par écrit de notre consul ou commissaire de commerce, ou de leur fonder des pouvoirs au lieu pour lequel le navire est destiné, ou, à leur défaut, du magistrat compétent ou de quelque autre personne publiquement autorisée et qualifiée pour cet acte; laquelle attestation certifiera l’arrivée du vaisseau et le déchargement des marcbandises conformément à la déclaration sus-mentionée & *en sera la preuve légale. Cette attestation sera envoyée à notre collége général d’économie de commerce aussitôt que le vaisseau sera arrivé au port pour lequel il est destiné, ou bien après son retour dans un des ports de nos royaumes. En cas que cette attestation ne soit pas remise dans un délai proportionné à la longueur du voyage, notre collége général d’économie et de commerce exigera du fréteur du navire une déclaration, telle qu’il consentirait à l’affirmer par serment, portant qu’il n’a reçu aucune nouvelle, ni du navire ni de ces marcbandises. Si l’arrivée du navire et le decbargement des marcbandises ci-dessus spécifiées dans un port neutre ne peuvent être prouvés, et qu’une prise en mer ou quelqu’autre événement inalheureux n’en soit pas la cause, le fréteur pay era à la caisse de notre collége général d’économie et de commerce une amende de vingt rixdales pour cbaque last de commerce que porte le navire; et seront en outre autant l’armateur que le capitaine soumis à l’action fiscale conformément aux lois.

Art. 15. [529] Il est défendu à tous capitaines de navires de faire voile pour un port bloqué du côté de la mer par une des puissances en guerre; au contraire, ils devront se conformer strictement aux renseignements qui leur auront été donnés par les magistrals compétents relativement au blocus de ce port. En cas qu’un capitaine, *voulant entrer dans un port dont le blocus ne lui aurait point été conuu, rencontre quelque vaisseau de baut bord, portant pavilion de quelque puissance en guerre, dont le commandant l’avertisse que ce port est réellement bloqué, il sera obligé de se retirer incessament, et ne tentera en aucune manière d’y entrer, tant que le blocus n’en sera pas levé.

Art. 16. Il ne sera permis à aucun de nos sujets de s’engager au service de quelque corsaire ou armateur en course d’un pays en guerre, ni d’armer lui-même des bâtiments pour pareille entreprise, ni d’avoir part ou intérêt dans ce genre d’équipement. Aucun armateur, aucun capitaine, ne doit permettre qu’il soit fait usage de son navire pour transporter des troupes ou munitions de guerre, de quelle espèce que ce puisse être. Au cas qu’un capitaine ne puisse empêcher que, pour pareil service, il soit abusé de son navire par une force irrésistible ii sera tenu de protester, d’une manière solennelle et par acte autbentique, contre la violence qu’il n’a pas été en son pouvoir d’éviter.

Art. 17. [530] Lorsqu’un vaisseau, non convoyé par une protection militaire, sera hélé en mer par quelque bâtiment armé appartenant à une des puissances belligérantes, *et qui serait autorisé à demander l’inspection des papiers de mer à bord des vaisseaux marchancls, le capitaine n’opposera aucune résistance à cet examen, si le commandant du bâtiment armé annonce l’intention de le faire; mais il sera, au contraire, obligé d’exhiber fidèlement, et sans dissimulation [Page 121] queleonque, tous les papiers et actes appartenants tant au navire qu’à sa cargaison.

Il est pareillement défendu, sous des peines sévères, tant au capitaine du navire qu’à ses officiers et équipage, de jeter à la mer, déchirer ou retenir aucun des documents faisant partie des papiers relatifs au navire et à la cargaison, soit avant la visite, soit pendant qu’elle se fera. Dans le cas que nous aurions accordé au commerce une protection armée sous notre pavilion, alors les capitaines marchands qui désireront d’être regus sous convoi seront tenus préalablement d’exhiber leurs papiers de mer au cbef du convoi, et de se régler en tout d’après ses ordres.

Art. 18. [531] Tout armateur ou capitaine qui contreviendra, en tout ou en partie, aux articles et régles de cette ordonnance, sera déchu de son droit de bourgeoisie et de commerce maritime, et en outre soumis à l’action fiscale conformément aux lois, et puni d’après la qaalité du délit, soit comme parjure, *soit comme infracteur des ordonnances royales. Notre intention royale, au contraire, est de protéger et maintenir les droits de tous nos chers et fidèles sujets qui se conformeront strictement aux règles ci-dessus dans leur commerce et navigation lègitime. En conséquence, nous avons ordonné à tous nos ministres, consuls et autres agents en pays étrangers d’employer leurs soins les plus actifs à ce qu’ils ne soient ni vexés ni molestés, et, s’ils le sont, de leur aider à obtenir justice et le redressement de leurs griefs. Promettons en outre d’appuyer toute réclamation fondee qu’ils se trouveront dans le cas de nous faire bumblement exposer.

Donnée à Copenhague, le 4 mai 1803, sous notre main et sceau.

CHRÉTIEN, E.
[l. s.]

Schimmetmann-schestedt.